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Montagne, Montagnettes et Montagnard(e)s...
17 juin 2009

SUR UNE CIME PERCHES

Ce week end (13 & 14 juin 2009), l’action se passe dans le parc des Ecrins, en Oisans.

P6130092Ce territoire (91 800 hectares) s’étend entre les villes de Grenoble, Gap et Briançon et est délimité par les vallées de la Romanche, la Guisane, la Durance et par le Drac… Qui plus est, possède de nombreux sommets dont le point culminant à 4 102 m d’altitude est la Barre des Ecrins ; nombreux sommets disais-je dont l’appel ensorcelant - v’ouais, comme celui des sirènes d’Ulysse - nous oblige, non pas à nous boucher les oreilles et à nous ficeler comme des saucissons mais à dépasser nos limites physiques et mentales parfois, pour les vaincre.

Notre kif à nous, pour ces deux jours ensoleillés - garantie Darty météo - est la Cime du Vallon dont l’altitude de 3 409 m ne nous demandera pas un réveil trop matinal. Une course donnée comme facile par notre topo ; ce à quoi personne ne trouvera à redire. C’est quand même la première course de haute montagne de la saison pour nous !

Inutile donc de partir aux aurores et je suis déjà sur le trottoir (!?) en ce samedi matin vers 8 h, dans l’attente de mes compagnons de vadrouille, Didier, Guy et Georges. C'est à peu près à l'heure planifiée qu'ils me cueillent aux portes de ma maison. La voiture, comme à son habitude, est chargée à bloc : sacs à dos, cordes, chaussures, crampons, piolets, casques et tutti quanti… et un petit cake aux olives et lardons cuisiné en plus de mes casse-croûtes et à partager ; histoire de démarrer la ballade sous de goûteux hospices !

Quelquefois voyez-vous, il est bon de commencer les choses par le réconfort, l’effort venant ensuite n’en sera que mieux accompli.

La route est tranquille jusqu’à la sortie du village de la Chapelle-en-Valgaudemar (1 100 m d’altitude), point de départ du sentier qui doit nous mener au refuge de l’Olan, petit refuge de pierre perché à 2 350 m d’altitude dans un cadre magnifique. La dénivelée est donc de 1 250 m en montée progressive et constante sur un chemin étroit et caillouteux qui serpente à flanc de montagne et n’offre pas beaucoup de zones d’ombre pour nous protéger des rayons d’un soleil un peu trop besogneux en ce jour.

Mais nous avons décidé de marcher en profitant du paysage ; souvenez-vous : rien ne sert de courir... P6130105

Ainsi, Didier et moi, chacun de notre côté, prenons le temps de faire de belles photos que je ne manquerai pas de mettre en partage ici pendant que Georges essaie de résoudre son problème de chaussures qui lui fait un peu mal aux pieds - compeed, le meilleur ami du randonneur mal chaussé ou à chaussures neuves - et que Guy, décidé à battre les informations du panneau indicateur consulté en début de randonnée, trace comme un forcené.

Rien ne presse : la montée signalée effectivement en 3 h 30 nous prendra, à nous trois, à peine un peu plus de 4 h - Guy la fera en 3 h 15 - car nous autres, ménageons nos forces en vue de la course du lendemain. Il est si bon de prendre son temps, de se poser un peu pour discuter, de tremper les pieds dans l’eau glacée... brrrrrrrr… du torrent qui nous accompagne en sens inverse de notre ascension et de contempler les merveilles de la nature. D’ailleurs, une marmotte nous filera sous le nez à vitesse grand V, sans doute effrayée par l’ineptie de certaines de nos conversations !

Et le rêve devient réalité - oui, je l’avoue, cela faisait un moment que j’y pensais - quand arrivés au refuge, nous nous installons pour déguster une bière fraîche et flemmarder jusqu’à l’heure du dîner. Ah… bonheur des choses simples telles la première gorgée de bière et la douceur d’une fin d’après-midi au soleil !

Puis, nous préparons nos sacs pour le lendemain en laissant sur place, dans des bassines en libre utilisation, tout ce qui ne sera pas nécessaire à la "grimpette" programmée. Nous récupérerons le tout au retour.

Nous partageons la table du repas du soir - soupe de lentilles, spécialité de saucisses locales aux herbes, fromage et gâteau au yaourt maison - avec un groupe du club alpin de Gap pas piqué des vers et qui nous fera bien rire ; particulièrement l’un de ses membres, Monsieur-je-sais-tout-qui-a-pêché-la-sardine-qui-a-bloqué-le-port-de-Marseille !!!

P6130131

Le lendemain matin, lever à 5 h pour un départ à 6 h vers la Cime du Vallon. Le jour est déjà là : la lampe frontale sera donc inutile. Je fais juste quelques photos pour capter le rougeoiement du ciel au-dessus des montagnes, nous prédisant que le soleil sera à nouveau de la partie aujourd’hui… Et go !

Nous atteignons très vite la limite en neige de la course où nous faisons un arrêt pour chausser nos crampons. Didier et Georges s’encordent. Guy et moi restons en électrons libres de nos mouvements. Du coup, j’en profite pour prendre un rythme un peu plus rapide et me permets un dépassement en règle. Je me sens bien. Il ne fait  même pas froid, je n’ai pas de gêne respiratoire liée à l’altitude - merci le jogging - et mes pensées guident mon pas, calme, régulier et assuré sur une neige dure et agréable à mordre avec les crampons.

1er arrêt sur un monticule de rochers : cela fait quasiment deux heures depuis le départ du refuge que nous marchons et nous allons passer aux choses plus sérieuses.

Tout le monde est encordé et il faut désormais suivre le pas du 1er de cordée, Didier… un peu saccadé à mon goût mais la haute montage est une affaire d’équipe et de discipline donc je suis.

P6140139Nous restons à l’ombre d’une barre rocheuse et avançons ensemble. La montée est sans histoire si ce n’est le passage un peu raide d’un mur de neige et rochers que nous franchirons prudemment mais sans difficulté.

Après avoir dépassé une dernière pente assez abrupte (sans doute entre 40 et 45 degrés), nous atteignons l’arête neigeuse annonçant la proximité du sommet, bordée de nombreuses corniches prêtes à s’effondrer au moindre remous. Nous longerons cette arête pendant une centaine de mètres avant d’escalader la dernière portion rocheuse et accéder au top où la vue nous coupe le souffle et où nous nargue le Pic de l'Olan, proche voisin de la Cime du Vallon.

C’est toujours un moment spécial et heureux que celui-là : victoire sur la montagne mais plus encore victoire sur soi. Je félicite «mes» hommes et leur colle deux gros bisous sur les joues. Juste pour dire «merci» - une petite contrepartie des deux ou trois fois, lors de nos différentes sorties, où sous le coup de la fatigue ou de l'énervement et d'une vanne de trop, j'ai osé les envoyer promener "chaleureusement" (?). Oups... je n'ai pas dit que j'en étais fière non plus.    

Nous redescendons sur les rochers pour nous mettre à l’abri du vent froid qui souffle tout là-haut et faisons une collation bien méritée et requinquante. Il est 10 h passées et nous dévorons comme des affamés. La montagne, ça vous gagne mais ça vous creuse aussi !

La descente sera plus rapide mais assez éprouvante : la neige a fondu et rend la marche moins sûre en chassant sous nos pas ou en se collant en gros tas traîtres et glissants sous nos crampons que nous bottons parfois. Il faut aussi se méfier de certains passages escarpés dans lesquels roche, neige et glace menacent de nous faire chuter. La fatigue se fait sentir maintenant et puis, quelquefois, la neige (soupe de neige) s’effondre sous notre poids - enfin, surtout sous celui de mes compagnons de cordée qui m’en voudraient presque d’être plus légère qu’eux… morte de rire - et nous oblige à puiser dans nos forces pour nous sortir du trou - ce qui ne se fait pas sans quelques "saperlipopette", "scrogneudidju" et autres rares noms d'oiseaux !   

P6130098Mais bon an, mal an, nous triompherons de toutes les embûches et rejoindrons le refuge de bonne humeur pour rassembler tout notre équipement et attaquer la descente jusqu’à la voiture.

Cette descente-là est plus pénible encore. La fatigue nous grignote de plus en plus. Le sac est de plus en plus lourd sur nos épaules endolories, les pieds sont en compote dans les chaussures rigides et voudraient s’évader de leur carcan «coqué». En plus, on dirait que les cailloux sont encore plus nombreux sur le chemin et qu'ils font exprès de nous faire trébucher…

Contrairement au dicton, ce n’est pas la montagne qui vient à nous mais nous qui sommes allés à elle alors, à nous aussi, de nous en retourner !

Toutefois, le ciel se couvre et la chaleur diminue. Une brise rafraîchissante nous ravigote et nous pousse un peu. Les éléments - vent, nuages, grisaille, grondements du tonnerre - nous mettent la pression. Enfin, la voiture… Yeah !!! Et l’orage se déchaîne comme un démon en pétard mais trop tard, nous sommes déjà à l’abri. Du refuge, il nous aura fallu un peu moins de 2 h 30 pour retrouver notre véhicule sauveteur. "Car, sweet car !"

Bientôt comme à l’accoutumée, nous nous attablons au bistrot du coin pour nous délecter d’un bon panaché citron vert et nous réjouir de nos exploits et de nos plus de 4 600 m de dénivelée cumulée effectués sur deux jours.

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Commentaires
R
Coucou Copine<br /> <br /> Contente d'avoir une belle prose à lire.<br /> <br /> Superbe les photos, mais il y a beaucoup de monde tout en haut de ta montagne...<br /> <br /> A+<br /> Ray
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